Surveillance et traitement
face aux moustiques de printemps
Comme chaque année, le SDDEA a engagé la campagne de démoustication dite « de confort », dès le mois de janvier.
Le terme usuel de « démoustication » est couramment utilisé mais il est plus adapté d’employer les termes de « régulation » ou de « gestion des populations de moustiques ». En effet le travail le plus important de la mission n’est pas tant la réalisation du traitement que la préparation des campagnes d’épandage. L’objectif est qu’elles soient réalisées au bon moment, au bon endroit, dans les bonnes conditions météorologiques et hydrologiques, et avec les bons produits.
Rappelons cependant que la présence des moustiques reste naturelle et qu’ils sont un maillon essentiel des écosystèmes. Bien qu’un effort particulier des collectivités soit assuré pour maitriser au mieux la gêne, il ne peut s’agir que d’un objectif de régulation et non d’extermination.
La campagne du printemps 2023
Un premier traitement, adapté aux besoins et aux conditions hydrologiques de début mars, a été déployé mi-mars, sur une surface totale de 350 ha par hélicoptère et 35 ha par voie terrestre. Ce traitement concerne les larves de moustiques et non les adultes. Ainsi, non seulement cela permet d’intervenir de manière préventive, mais aussi de recourir à des produits de traitement dits « biocides », très sélectifs, avec un impact très réduit sur l’eau et l’environnement.
Ces traitements sont réalisés en fonction des zones de développement, dites « gîtes larvaires », qui répondent à la présence significative de moustiques. L’inventaire mené par les équipes du SDDEA est assuré sur les gîtes importants et récurrents. Il progresse chaque année à la faveur de nouveaux signalements ou de la création de nouveaux gîtes conséquents à la suite de certains aménagements. Cet inventaire ne prétend malheureusement pas à l’exhaustivité.
À noter que les moustiques se développent également sur des « micro-gîtes » de quelques mètres carrés tels que le réseau pluvial, des flaques et autres ornières sur des chemins, ou encore des stocks de pneus et les aménagements de jardin. Il est donc impossible d’en avoir une vision complète et d’y intervenir. Enfin, le SDDEA n’intervient que sur les communes où est transférée la compétence : il ne couvre donc pas l’intégralité de la vallée.
L’espèce ciblée par les traitements de mi-mars est l’Aedes rusticus, gros moustique à l’origine d’une gêne très importante si aucun traitement n’était réalisé. A l’occasion des importantes précipitations de la fin mars et de début avril, qui ont provoqué une remise en eau significative de zones propices au développement des larves, une nouvelle observation de terrain a été diligentée à la mi-avril. Elle visait à étudier l’opportunité de réaliser un second traitement. Elle a permis de constater la disparition des larves visées par le traitement, donc son efficacité, et n’a pas mis en évidence de nouvelles populations en émergence. Il n’a donc pas été réalisé de nouveau traitement.
Que se passe-t-il concrètement ?
Malgré cette surveillance, nous faisons face actuellement à une invasion importante sur certaines communes. Le SDDEA a donc, comme à l’habitude, procédé à une enquête afin de comprendre le phénomène et d’en tirer les enseignements dans une logique d’amélioration continue du service.
Les premiers échantillons d’individus adultes prélevés montrent la présence quasi-exclusive de l’Aedes sticticus, et une très faible proportion d’Aedes rusticus, illustrant la réussite des traitements de mi-mars sans laquelle la gêne actuelle serait démultipliée. Certaines stations ont également mis en avant la présence d’Aedes Vexans, de manière restant toutefois plus ponctuelle.
Aedes sticticus est donc le responsable du phénomène observé actuellement. Il s’agit d’un moustique que l’on qualifie de « moustique d’été » : de petite taille, énergique et capable de créer plusieurs générations sur une année. L’éclosion de l’Aedes sticticus a été tardive mais les températures observées ont dû permettre un développement rapide des larves, probablement en quelques jours, passant ainsi au travers des mailles de la surveillance assurée par le SDDEA.
Les conditions pour traiter
La question des produits utilisés et de leur fonctionnement conditionne une part importante de la réussite des traitements. Le moustique peut être traité à différents stades de son cycle de vie. Au stade de la larve, lorsqu’il se développe dans les zones d’eau stagnantes et temporaires, et au stade de l’adulte, lorsqu’il vole et exerce une pression de piqûre sur les populations humaines. En fonction de la période du cycle de vie traité, les produits utilisés ne sont pas les mêmes.
Les traitements au stade larvaire sont des traitements biologiques, dont la substance active est la bactérie du bacille de Thuringe. La bactérie s’attaque au tube digestif des larves, rendant son ingestion fatale. A contrario des traitements adulticides, ces larvicides sont spécialisés au moustique, limitant l’impact sur le milieu naturel. En effet, les produits adulticides sont composés de substances actives chimiques, qui peuvent affecter un plus large spectre d’êtres vivants. Leur utilisation est aujourd’hui cantonnée à la gestion de risques sanitaires majeurs, par exemple dans le cadre de la lutte contre le moustique tigre. Elle est également assortie de conditions d’épandage très spécifiques.
Bien que l’utilisation des larvicides soit la solution pour la régulation de la gêne causée par les moustiques communs, elle n’en est pas moins complexe à mettre en œuvre. On ne dénombre pas moins d’une vingtaine d’espèces de moustiques sur notre territoire, dont six piquent l’homme. Chacune de ces espèces dispose de conditions de développement différentes répondant notamment aux paramètres suivants :
- Le milieu de développement: certaines préfèreront le sous-bois alors que d’autres affectionnent les prairies ouvertes,
- La saisonnalité : toutes les espèces n’émergent pas en même temps. L’Aedes rusticus est présent sous forme de larves dès le mois de décembre, contrairement à l’Aedes vexans, beaucoup plus tardif dont l’éclosion n’apparaitra pas avant avril-mai et durera tout l’été si les conditions hydrologiques le permettent,
- La vitesse de développement des larves. Les larves les plus précoces mettent plusieurs mois à se développer alors qu’en cas de températures favorables, cinq jours peuvent suffire pour les espèces tardives.
Ainsi, le nombre de variables est tel que la réussite systématique des traitements nécessite une parfaite connaissance des espèces et du territoire, ainsi que le déploiement ponctuel de moyens humains et matériels considérables. Afin de répondre au mieux aux objectifs de régulation, tout en assurant la maitrise des coûts de la compétence et la préservation des écosystèmes, le SDDEA déploie chaque année une méthodologie d’expertise de chacune des zones de développement potentiel des larves. La surface totale surveillée chaque année est de plus de 2000 hectares, représentant 612 gites larvaires potentiels sur les 115 communes du périmètre de compétence.
Qu’attendre pour la suite ?
Au regard de l’impossibilité de traiter les moustiques adultes, la réalisation de traitement lorsque les premières piqûres apparaissent n’est pas une option. L’activité du service de démoustication du SDDEA se concentre alors sur la compréhension du phénomène, la capitalisation de l’information récoltée et le retour d’expérience. Des pièges permettant l’échantillonnage sont ainsi déployés sur le territoire. De nouvelles investigations de terrain seront conduites dans les jours à venir, sur les gîtes connus mais également par la recherche de nouveaux gîtes. Des traitements ponctuels pourront être menés si besoin.
Les précédents retours d’expérience laissent penser que cette génération de moustique exercera une pression de piqûre sur une durée de 2 à 3 semaines, soit jusqu’à début juin. On note cependant que la suite dépendra directement des conditions hydrologiques. Si d’importantes précipitations sont observées dans les mois à venir, de nouveaux traitements seront déployés mais ne sauraient présentés la même efficacité que ceux réalisés mi-mars sur l’Aedes rusticus.
Enfin, les moustiques concernés pas les traitements du SDDEA sont les moustiques dits « de vallée », à la différence des moustiques dits « de jardins » (majoritaire : Culex pipiens): pour ceux-ci, les bonnes pratiques de chacun sont le seul levier d’action. Les bons gestes : éviter toutes les sources d’eaux stagnantes, notamment en vidant les petites accumulations d’eau dans des bidons non fermés, pneus, pots de fleurs…
Pour en savoir plus
- Pour la campagne 2023 de traitement aérien, l’hélicoptère de la société Air Champagne a survolé environ 350 hectares répartis sur les communes de : Port-Saint-Nicolas ; Saint-Just-Sauvage ; Pars-lès-Romilly ; Bagneux ; Plancy-l’Abbaye ; Dommartin-le-Coq ; Le Mériot ; Nogent-sur-Seine ; Saint-Hilaire-sous-Romilly ; Crancey ; Saint-Oulph ; Villiers-aux-Corneilles ; Vouarces ; Allibaudières ; Dampierre ; Magnicourt/Brillecourt ; Aulnay ; Précy-Notre-Dame.
- Les traitements terrestres (ou manuels) ont été menés par les agents du SDDEA sur les communes de : Marcilly-sur-Seine ; Le Mériot ; Barbuise ; Romilly-sur-Seine ; Maizières-la-Grande-Paroisse ; Saint-Just-Sauvage ; Courcemain ; Bessy ; Morembert ; Coclois ; Magnicourt ; Aulnay ; Molins-sur-Aube ; Précy-Notre-Dame ; Epagne ; Dienville ; Nogent-sur-Aube ; Chaudrey ; Etrelles-sur-Aube.